Neuf petites années ont suffi à Bernard Charlet pour devenir champion sur les concours fédéraux vieux de la première région. Retour sur un parcours riche.
La genèse. Aujourd’hui âgé de 68 ans, Bernard Charlet fait partie de ceux qui ont baigné dans la colombophilie tout jeune. Son père, André, boulanger, fut un grand champion et joua dans l’arrondissement de Cambrai, ou plus tard dans celui de Valenciennes. Il eut les mêmes très bons résultats, à l’arrière de Cambrai, puis à l’avant de Valenciennes. André eut la chance d’effectuer son service au colombier militaire. Mais revenons à notre champion, Bernard. Son activité professionnelle pour Versele-Laga l’éloigne des pigeons. Il voulait vendre des graines, le fils de boulanger vendit de la farine. Mais la retraite arriva et, en 2011, il décida d’installer ses premiers colombiers. Il prend alors sa licence au Local unique de Bouchain. Son fils, Thomas, « sans être coulonneux » le suit et devient trésorier de la société, où il s’occupe du jeu.
Bernard Charlet ne possède plus de pigeons provenant de la souche de son père, et compte tenu de sa situation au point avant de l’arrondissement de Valenciennes, il prend la décision de se tourner vers les longues distances. Pour ce faire, il acquiert des pigeons chez Hétru, Mathieu de Clippel, et rentre chez lui avec des œufs de chez Bernard Cattiaux. L’un de ces œufs est une femelle d’origine Maurice Casaert qui, avec le roux Hétru FR09 441857, formera un des trois couples de base de la colonie actuelle. Sans oublier les pigeons d’origine Janssens, arrivés des stations Natural et Hétru.
Les installations. Pas de bonne colonie sans colombier sain. Les veufs et pigeonneaux sont dans des pigeonniers du commerce, dont Bernard Charlet a amélioré l’aération, tout en maintenant « une bonne ventilation sans courant d’air » : tuiles de faitage surélevées, aérations supplémentaires sur le haut des pignons. L’arrière sous le niveau du plancher a été retiré pour que l’air circule et permette d’avoir un plancher sec. Les femelles et les reproducteurs sont dans des volières à l’écart. Le toit de la petite volière située entre les deux pigeonniers sert de poste de guet lors des concours, cela permet de voir au loin. Les pigeons, habitués, ne sont pas apeurés par leur maître.
Ces pigeonniers accueillent 50 veufs, et autant de jeunes, et huit couples sont dans la volière des reproducteurs. Les femelles ne sont pas jouées et ont leur propre volière.
Les voiliers et leurs résultats. L’un des pigeons phare de la colonie de Bernard Charlet est le bleu FR11 160890. C’est un pigeon de race Jansens, via Natural pour le père, via Hétru pour la mère. Il a voyagé jusqu’en 2019, et est passé à la reproduction cette année. Accouplé à une femelle de Michel Descamps, ses jeunes 2020 se montrent déjà. Son palmarès parle pour lui. Son meilleur fait d’armes est un premier prix sur Treignac le 11 juin 2016. Il a de nombreux prix de tête sur Saran Gien, Bourges, Souillac et Montauban.
Les résultats de cette saison 2020 sur les concours fédéraux vieux sont éloquents, et expliquent le titre de champion en vieux sur les fédéraux de la première région.
Concours Fédéraux Vieux NPdC |
Amateur |
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Date | Lâcher | Nombre | Inscrits | Prix | détail | |
13/06
29/06 11/07 25/07 08/08 22/08 |
Argenton
Saint-Junien Savigneux Chateauroux Issoudun Saint-Junien |
15387
13581 6383 4856 3407 1421 |
27
22 15 8 8 8
|
7
11 8 5 2 5
|
536, 1856, 2553…
649, 794, 1114, 1334… 42, 62, 123, 237, 395… 29, 349, 858, 873, 1059 190, 194 16, 17, 46, 84, 134 |
Sur ces six concours, dans le groupement de Valenciennes, Bernard Charlet place au moins un pigeon dans les dix premiers sur quatre concours. On peut aussi ajouter un 4/6 à Agen du CIF, et, malheureusement, le retour de trois vieux pigeons blessés lors de ces concours.
Trois des pigeons de Bernard Charlet sont classés à l’AS pigeon fond vieux. Trois pigeons parmi les 100 plus réguliers cette saison. Bon à savoir : 31ème pour le FR17 417153 ; 517ème pour le FR15 446242 « Le Perpignan », et 72ème pour le FR17 416731.
Le Perpignan est un petit-fils du roux Hétru FR09 441857 ; il est classé sur Perpignan en 2017, 2018 et 2019. En 2020, il retourne avec bonheur aux fédéraux.
Le FR17 416731 est un écaillé, fils du bleu FR11 160890. Le 731 est classé à l’as pigeon, et est le premier constaté sur trois des six concours fédéraux… belle performance.
L’année au colombier. La recette du succès ? De bons pigeons dans un pigeonnier sain, le tout bien coaché, bien soigné. Les reproducteurs sont accouplés fin novembre, et deux couvées sont gardées. Les veufs sont accouplés mi-février, et certains de leurs œufs sont passés aux reproducteurs sur leur troisième couvée. Les vieux veufs n’élèvent pas, ils seront séparés après avoir abandonné leurs œufs. En revanche, les veufs d’un an vont élever « pour renforcer l’amour du pigeonnier, du casier ». Le couvage est le moment propice aux traitements contre la trichomonose, la coccidiose et les vers. Les pigeons reçoivent aussi le vaccin PMV.
La préparation de la saison est fonction du calendrier et de la météo, mais ce sera quelques concours de vitesse, puis demi-fond, avant d’engager les pigeons sur les fédéraux et les internationaux. Le plateau est retourné avant l’enlogement. Les veufs ne voient leur femelle qu’au retour, jusqu’au dimanche fin de matinée, ou fonction de l’arrivée de la vitesse.
Les veufs sont nourris au casier avec du mélange… Versele-Laga : dépuratif les jours suivant le concours, puis du Gerry jusqu’à une transition vers le Energy pour les derniers jours avant l’enlogement. Pendant ces derniers jours un apport de mélange dessert est ajouté. Côté boisson, au retour c’est électrolytes avec miel et jus de citron, tisane le lundi, puis eau changée tous les jours. Pour compléter l’alimentation les pigeons ont du grit, du Vitaminéral, de l’huile d’ail, de la levure de bière toute l’année, ainsi que des légumes coupés en petit dés ou rapés, de la salade. Ils tapent directement dans le thym.
Quant aux jeunes, Bernard Charlet les entraine plusieurs fois à 20 km, puis à 50 km. Viennent ensuite les enlogements sur la deuxième partie de saison pour éviter les effectifs trop importants du début de saison (les colombiers sont au point avant). Les jeunes sont mélangés et il n’y a pas de cellule en fonction de l’âge ou du sexe. Des jeunes femelles iront sur les fédéraux, pour « une sélection en vue de la reproduction », car, comme disait son père André, « les premiers œufs d’une belle jeune femelle sont les meilleurs ». Et Bernard de renchérir « surtout s’ils donnent deux mâles »
En fin de saison, Bernard Charlet coupe le bout des rectrices de ses pigeons (voir photo du 731). Cela lui permet, en janvier, en déployant la queue de ses voiliers, de voir si tout a été mué. En effet, une plume pas muée est égale à une plume arrachée, qui équivaut à une plume neuve. Les pigeons ont du mélange mue (Mutine), puis auront 70% d’orge ensuite. Son critère de sélection est fixé à un prix sur deux pour les vieux, Concernant les jeunes, il y a peu de critères sportifs, puis quelques-uns sont écartés « à la main ». Seul problème rencontré par notre champion ? « Je ne sais pas tuer ». Le vide se fait donc en cédant les jeunes non gardés, les veufs retraités, et autres pigeons.
Pour éviter la tentation il ne bague pas d’arrière-saisons, sauf en cas de demande et de réservation. Autre moyen de ne pas baguer, et de favoriser la mue : les veufs n’élèvent pas en fin de saison, ils font deux couvées à blanc avant d’être découplés.
La saison est terminée, la saison prochaine se prépare déjà, avec l’adduction des jeunes mâles chez les veufs, et une bonne mue.
JEAN-FRANÇOIS DESPINOY (CLP)